Assise devant un bon milk shake à la vanille dans un café d’Oulan Bator, hyper moderne et jeune, avec wifi, je me dis que le contraste est parfait pour me mettre à raconter mon expérience dans les steppes mongoles. Autre mode de vie, autre monde.
Je vais essayer de retranscrire mes impressions et mettre le plus possible de photos, mais malheureusement ni les mots ni les images ne pourront refléter en totalité les différents aspects du voyage. J’espère en tout cas vous donner un aperçu de ce pays, des ses étendues sauvages et (presque) totalement épargnées, de son hospitalité, de ses traditions, de ses spécialités culinaires, etc,. Evidemment 10 jours ne suffiront jamais à parfaitement comprendre le pays et les gens, mais j’ai quand même l’impression d’avoir découvert plein de choses nouvelles et auxquelles je ne m’attendais pas forcément.
Un article un peu long… accrochez-vous ! :)
Alors pour planter le décor, je ne suis pas partie seule, mais avec Marit et Nils, le couple de norvégiens que j’avais rencontrés il y a 3 semaines à Irkutsk. On avait bien accroché et on s’était dit qu’on essaierait de faire un trip ensemble (oui, je vous entends déjà « tu vois Facebook c’est quand même bien utile ! »… oui ok c’est vrai…). Et nous sommes partis avec Baaska, notre guide de 24 ans parfaitement bilingue, hyper attentionné, marrant, bref super ! Il nous a été d’une grande aide pour nous aider à entrer en contact avec les familles de nomades et pour nous expliquer ce qu’ils faisaient, pourquoi, comment, ainsi que toutes les traditions qui régissent leur vie.
Partis à la rencontre des familles nomades et de leur mode de vie, nous avons fait un itinéraire assez restreint en nombre de kilomètres, mais vu l’état des routes il nous fallait bien 10 jours !
Et de toute façon, pas besoin d’allez bien loin pour découvrir les steppes et autres étendues sauvages si caractéristiques de la Mongolie.
En dehors des grandes villes (donc essentiellement de la capitale Oulan Bator), la Mongolie c’est donc surtout des paysages d’une immensité à couper le souffle, et finalement beaucoup plus variés que je ne le pensais :
- des plaines nues et des steppes à perte de vue : ici pas de clôtures, la terre appartient à tout le monde… les distances n’en apparaissent que plus impressionnantes (on note le ciel bleu au passage...)
- des dunes de sables (il n’y en a pas que dans le Gobi du sud)
- des lacs, presque tous asséchés en ce début d’automne
- des forêts, superbes couleurs en cette saison
- des montagnes, que nous avons eu la chance de voir enneigées
- et forcément avec de tels paysages dégagés et sur lesquels les hommes ne sont pas intervenus, des couchers de soleil incroyables…
et plus tard la nuit le spectacle des étoiles et de la voie lactée, magique !
Les 3 premiers jours nous avons été hébergé dans des yourtes de familles nomades : des gens qui n’ont rien ou presque et dont l’hospitalité est absolument incroyable.
Ensuite nous avons été dans des camps de yourtes pour touristes… à chaque fois les derniers touristes de la saison… et dans une dernière famille qui avait fait des yourtes son business. Mais comme nous étions les seuls nous avons pu partager tous leurs repas.
Mais tout d’abord les yourtes : ces petits champignons blancs éparpillés ça et là dans toute la Mongolie. Toutes sont construites de la même façon, la porte est toujours orientée vers le sud, et l’agencement de l’intérieur suit un certain nombre de règles. Le poêle à bois est au centre, c’est un espace sacré : pas question de jeter ses vieux papiers dedans ! Au dessus, le toit s'ouvre et fait office de fenêtre et d'aération. Les lits (simples, souvent très durs, pas forcément d’oreiller) sont regroupés sur les bords de la yourte. Le mobilier complémentaire est constitué de petits tabourets, d’une table basse, de quelques meubles avec les photos de famille et les divinités, d’un coin « cuisine » avec quelques plats et ustensiles, parfois d’un lavabo mais bien sûr sans eau courante. Et voilà, pas besoin de plus.
Ah si ! un panneau solaire pour avoir un peu d’électricité le soir : une ampoule, la TV et les téléphones portables !!
Et pour les toilettes ? Et bien soit c’est un trou dans le sol, parfois aménagé avec une petite toile pour la pudeur
sinon et bien c’est juste… là bas, un peu plus loin. Et bien non il n’y a pas d’arbre ni buissons dans les steppes… donc allez encore un peu plus loin !
Pour les bébés, pas de couche : deux ouvertures bien placées sur les pantalons et on se soulage tranquillement !!
Et pour la douche, et bien ailleurs, dans une autre vie.
Par contre le brossage de temps sous la voie lactée devient tout d’un coup assez incroyable !
Les yourtes sont toujours ouvertes la journée : le soleil permanent apporte de la chaleur, et les amis, la famille et à peu près tout le monde d’ailleurs peut ainsi aller et venir à sa guise : en Mongolie on ne frappe pas avant d’entrer dans une yourte. Amateurs d’intimité s’abstenir.
Nous avons eu la chance de partager le quotidien de ses familles, qui même si nous dormions dans une yourte à côté de la leur, nous ont accueilli et nourri en suivant leur mode de vie traditionnel. Bien sûr elles vivent en partie de ce tourisme, mais c’est quand même incroyable de voir cet autre monde. Avec des familles très différentes les une des autres : une femme avec sa maman âgée, un couple avec leur fils, belle-fille et petits enfants, et une famille dont on n’a jamais vraiment compris qui étaient les enfants, cousins, oncles, amis, passants, … Mais il faut dire aussi que c’était le week-end et il y avait pas mal de passage.
Leur vie suit le rythme des saisons, et comme leur nom l’indique ces familles nomades changent d’emplacement 3 à 4 fois par an.
Ils démontent leur yourte et partent vers un emplacement plus adapté à la saison avec leurs troupeaux : des chevaux, des vaches, des moutons, des brebis, et parfois des chameaux (mais ça c’est plutôt pour les touristes !) et des yacks (selon les régions).
Et quand les loups s'approchent un peu trop près des moutons, ils le paient le prix fort!
Mais ils ont quand même toujours une moto et parfois un pick up pour aller se ravitailler et pour se déplacer vers les villes / villages alentour.
Comme ils sont nomades, pas question de cultiver des légumes. Les plats traditionnels sont donc essentiellement composés de riz ou de pates, avec parfois des pommes de terre / carottes / choux (les seuls légumes qu’ils achètent) et beaucoup de viande. Ils travaillent tellement dehors pour s’occuper de leurs animaux qu’ils ont besoin de protéines : viande de mouton fumée (hyper forte… mais pas de frigo pour la conserver autrement…), bouillie, frite, viande de bœuf, ou de yack.
Et les vaches permettent grâce à leur lait de fabriquer tout un éventail de produits laitiers : lait, crème, beurre, yaourt, et plein de trucs dont je n’ai pas bien compris ce que c’était mais qui avaient plus ou moins un goût de parmesan… en y croyant bien fort.
Quand ils ont des yacks ils boivent leur lait : chaud et sucé le matin c’est très bon !
Enfin, les juments produisent du lait qui sert à faire la boisson nationale : l’airag, ou lait de jument fermenté dans des grands barils en plastique. Toutes les familles qui ont des juments en produisent, et c’est la tradition d’en offrir aux hôtes. Relativement peu alcoolisé (environ 5%), j’ai trouvé que ça avait un goût de fromage de chèvre.
Ah et aussi ils boivent du thé, au lait… et salé. Quand c’est pas trop salé c’est plutôt bon, mais souvent c’est très salé !
Au final tout cela était plutôt bon, mais j’ai un peu souffert des odeurs : odeurs des animaux, odeurs du lait caillé, de la viande de mouton… je suis quand même un peu plus souris des villes que souris des champs et ceux qui me connaissent bien savent que mon sens de l’odorat est assez développé, dur dur donc de garder le sourire dans les yourtes quand j’avais le cœur retourné. C'est juste une question d'habitude j'imagine.
Petite anecdote sur la façon dont sont tués les moutons : ils les tiennent par les pattes, encore vivants, entaillent leur ventre très rapidement et très précisément, glissent la main à l'intérieur de la bête et pincent l'artère du coeur jusqu'à ce que le mouton meurt, c'est à dire en quelques secondes. Et voilà, pas de cri, pas de sang, hyper propre.
Et puis il faut aussi oublier direct tous nos repères d’européens en termes d’hygiène, de cuisine, etc… Mais ça fait du bien de voir un peu autre chose. On relativise.
Nos journées n’étaient pas surchargées, mais c’était parfait comme ça : ballades à cheval, parfois à chameau, glande au soleil les premiers jours quand il faisait si beau, à observer les familles et leur quotidien.
Du temps pour se balader, pour lire au coin du feu, pour penser, pour observer les familles dans leurs travaux quotidien de traite, de coupe de bois, pour en prendre plein les yeux de ces paysages et de ces couleurs incroyables, et un temps qui s’écoulait lentement mais sûrement.
Nous nous laissions guider, nous avons d’ailleurs décidé le premier jour de ranger tout au fond de nos sacs nos montres et téléphones portables, de vivre avec le soleil (de toute façon c’est ce que font les familles), de nous coucher tôt, de faire la sieste l’aprem. Tout ça dans une entente collective hyper bonne. Bref de la sérénité, du zen une vraie parenthèse.
Nous avons quand même visité Karakorum, ancienne capitale de l’Empire mongol
Puis nous sommes relaxés (et oui, dur de ne rien faire ou presque) dans des sources d’eau chaude
… c’est là que les choses se sont corsées niveau température avec l’arrivée de la neige
On s’est tellement caillés cette nuit là sous la yourte qu’on s’est relayées avec Marit pour alimenter le feu toutes les heures. Mais du coup on a rien dormi et les nuits suivantes on a utilisé nos couvertures de survie… bien utiles au final !
Et puis nous avons passé les 3 derniers jours au White Lake, à 2100m d’altitude. Froid saisissant mais quelle beauté !
Et nous avons passé le dernier jour à Tsetserleg, mignonette petite ville avec ses temples et staues de Boudha :
Heureusement on était bien équipés (merci la veste jaune !), et bien emmitouflés avec plusieurs couches de vêtements en haut et en bas jours et nuits nous avons vaincu les éléments ! Gros contraste avec les 1ers jours où le soleil tapait si fort !
Pour finir, quelques photos des endroits où j'ai dormi
Une aventure mémorable et de belles rencontres… comme j’espère en vivre encore beaucoup !
Prochain article : Pékin !